Le tissu Fresco

L’été est là, la chaleur aussi, et cependant il se peut que vous soyez coincé à Paris pour encore un bon mois, voire plus. Problème. Problème ? Pas si l’on considère qu’il existe des tissus adaptés à chaque saison et, pour ainsi dire, à chaque type de situation. Si vous êtes contraint de voyager loin et que vous devez impérativement porter un costume, peut-être serez-vous content de connaître le Solaro, un tissu d’été dont la trame, de couleur rouge, reflète les rayons UV du soleil. Si vous cherchez une tenue plus classique, plus neutre sans être terne, dans ce cas le Fresco est la solution qu’il vous faut. Etrangement, à Paris, seuls Artling et Husbands ont décidé de le mettre à l’honneur.

Le Fresco : un tissu italien, vraiment ?

Eh bien non. En dépit des apparences (fresco signifie « frais » en italien), le tissu Fresco est une invention britannique. Et si je parle d’invention, c’est qu’il a fait l’objet d’un brevet de la part de la société J.&J. Minnis. C’était en 1907. Par le jeu des rachats successifs, J.&J. Minnis est devenu Hardy Minnis, une marque qui appartient désormais à Huddersfield Fine Worsteds.

Les caractéristiques du Fresco

Que dire du tissu Fresco ? Le fil de laine utilisé est un fil hautement torsadé, ce qui rend le tissu assez rêche au toucher, à la fois aéré et très dense. Dense mais pas complètement opaque (il suffit de le placer à contrejour pour s’en rendre compte). Dense mais pas complètement uni non plus (à tel point que sur certains échantillons, on pourrait presque avoir l’impression d’un tissu chiné). Même si le high-twist est à déconseiller, trop léger, il n’est pas nécessaire de choisir un tissu très lourd pour obtenir un tombé impeccable. Le Fresco est durable, il « se tient », se froisse peu. On pourrait même en étendre l’usage à d’autres saisons que l’été. Attention toutefois aux courants d’air ! En raison de la haute torsion du fil, le Fresco « respire », c’est l’une de ses moindres qualités. Se pose alors la question de la doublure.

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Le Fresco vu par un pro : Nicolas Gabard, fondateur de Husbands Paris

Laurent Le Cam, Milanese Special Selection – Nicolas, merci de me recevoir pour parler de ton travail et plus particulièrement du Fresco. Husbands existe depuis plus de deux ans maintenant, trois si on compte la phase de mise au point des modèles, très importante puisque, contrairement à un certain nombre de marques qui choisissent leurs produits dans un catalogue fournisseur, tu es allé à la rencontre de la difficulté en décidant de réaliser tes propres patronages de costumes. Tu avais prévu d’intégrer le Fresco à ta collection dès le début ?

Nicolas Gabard, Husbands – En fait, j’ai commencé au mois d’avril, je n’avais pas encore la boutique, je faisais des pop-up stores, et j’ai commencé avec de la flanelle, de la flanelle Fox Brothers. L’anecdote, tu la connais : les Fresco auraient dû arriver en mai, au lieu de quoi je les ai reçus fin août. Mon premier accident industriel…

Laurent Le Cam, Milanese Special Selection – Comment t’est venue l’idée d’utiliser le Fresco ?

Nicolas Gabard, Husbands – Tout d’abord, il faut savoir qu’il y a plusieurs types de Fresco, en fontion du poids : le three-ply (entre 435 et 465 g/m), le two-ply (entre 280 et 310 g/m) et enfin le high-twist (entre 250 et 280 g/m), qui pour moi est inutilisable, qui s’apparente presque à un crêpe. À l’origine, j’avais cette veste vintage que j’adore, que tu as vue, dont je voulais reproduire le design, mais je ne voulais pas faire un fil-à-fil gris, tout le monde en fait, ça ne m’intéresse pas. Le concept de Husbands, c’est une matière, une histoire. Je me suis alors tourné vers Michael Tapia (qui était un ancien collaborateur de Ralph Laurent, et qui depuis a travaillé pour Boglioli, Kilgour) et je lui ai demandé de me trouver un tissu. C’est lui m’a « donné l’adresse » du Fresco. Depuis, c’est devenu quasiment ma meilleure vente.

Laurent Le Cam, Milanese Special Selection – Tu ne le vends donc pas uniquement pour l’été ?

Nicolas Gabard, Husbands – Ecoute, non, je vends des costumes en Fresco toute l’année. C’est un tissu qui a un tombé intéressant, qui n’est pas très fluide. Par ailleurs, on peut dire beaucoup de choses avec un costume en Fresco. Il peut faire très habillé ou être porté de manière très grunge. Certains de mes clients aiment son côté ex-RDA, crispy. Moi, ce que j’ai adoré, c’est que tu le retrouves dans un nombre incroyable de films des années 1960. Mon costume, c’est celui que porte Cary Grant dans La mort aux trousses

Laurent Le Cam, Milanese Special Selection – Tu proposes principalement un costume gris et un costume bleu. Je t’ai déjà vu porter le pantalon de l’un avec la veste de l’autre. C’est un conseil ?

Nicolas Gabard, Husbands – C’est une vraie belle opportunité. Tu achètes deux costumes en Fresco, c’est comme si tu avais acheté quatre costumes…

Merci à Nicolas Gabard d’avoir bien voulu répondre à nos questions, merci également à Virgil Viret (Lafayette Saltiel Drapiers), distributeur des tissus Huddersfield Fine Worsteds, de son aide précieuse pour la réalisation des photos.

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